La prière partagée constitue le cœur de la vie du Prieuré. Elle en rythme le temps au long des jours, des semaines et de l’année.
Rendre les prières de la tradition parlantes pour les hommes et les femmes de ce temps, est un des fondamentaux de la Communauté des moines depuis son origine.
La Prière quotidienne :
Nous pouvons prier à chaque moment de la journée, seul ou avec d’autres. Cette prière quotidienne, les communautés monastiques l’appellent « l’ Office ». Ainsi pour le chanter nous nous rassemblons le matin pour les Laudes, à midi pour la Prière du milieu du jour et le soir pour les Vêpres.
Cette prière trouve sa source dans la Bible et depuis des siècles elle garde toujours la même structure :
- un chant d’ouverture : l’hymne
- les psaumes ou des poèmes de la bible (cantique de l’AT ou du NT)
- la lecture d’un court passage de la Bible
- le « Benedictus » le matin ou le « Magnificat » le soir
- une prière de supplication, le Notre Père et la prière finale.
La Bible offre un cadre pour y couler nos préoccupations, nos états d’âme, nos conflits et nos joies dans des phrases que bien des croyants ont utilisées avant nous pour parler avec Dieu. Le chant des Psaumes et le récit des Écritures tissent entre nous une trame qui nous lient ensemble.
Mais comment prier avec ces vieux textes et les Psaumes particulièrement ?
Ces textes nous paraissent parfois si étranges ! Les Psaumes sont un petit livre de cette vaste bibliothèque qu’est la Bible : 150 prières, 150 poèmes en tout genre ; des joyeux et des tristes, pour des bons jours et des jours de peine, des demandes et des récriminations… ; ils essayent de dire l’essentiel de notre relation à Dieu qui reste toujours un mystère. Point besoin d’être savant ou parfait, il suffit d’être vrai avec sa vie comme elle est et de se tenir devant Dieu, en désirant aimer et recevoir de Lui sa liberté pour aimer davantage.
Pour aller plus loin
Prier avec les Psaumes :
Des poèmes
Prière-poème: dans un poème, tout n’est pas dit: on a de l’espace pour inventer la suite, la nôtre, que ne dit pas le poème ; Le psaume synthétise ce qu’ont vécu des générations de croyants, depuis peut-être 2500 ans et ce n’est pas rien. Car si chaque expérience de vie est unique, on se reçoit des autres, on se glisse dans une longue chaîne qui nous précède, nous enseigne et nous encourage. Jésus lui-même a prié les psaumes et nous apprend ce qui est bon : « Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux savants et de l’avoir révélé aux tout-petits » (Mt 11,25). la bonne attitude est dans la simplicité et la pauvreté.
Les Psaumes sont nés dans une tradition orale et sont faits pour être chantés, avec son souffle et tout son corps.
La louange
La louange est l’orientation principale des psaumes ; elle est l’attitude juste de celui qui se tient devant Dieu. La louange, c’est dire « Merci ». La vie est un don et, chaque jour, ce don se renouvelle et nous émerveille ! Mais ce n’est pas toujours simple et le psalmiste a aussi besoin de se plaindre, d’appeler au secours, de se souvenir aussi ; il somme Dieu de lui répondre et il fait bien. Car c’est ainsi qu’il se tourne vers Dieu en vérité. Si sa situation s’améliore, il convoque ses amis et ses proches à rendre grâce avec lui. « Moi, je redirai ta justice et chaque jour ta louange » (Ps 34, 28). « Quand je criais vers lui mon cri, ma bouche faisait déjà son éloge. » (Ps 65,16). Dans les psaumes, on loue Dieu d’abord pour sa justice
La justice
Oui, Dieu est juste, et la justice des psaumes est une justice globale, large, qui met de l’ordre dans le monde, assure stabilité, qualité de relation et apporte de la bonté : « Le Seigneur aime le bon droit et la justice, la terre est remplie de son amour, » (Ps 32,5). Le Dieu juste dévoile aussi l’injustice criante des hommes, le péché de convoitise, la domination des puissants et le malheur des petits. Quand nous chantons « Dieu tu nous as rejetés, brisés, Tu étais en colère, reviens nous » (Ps 59,3-4), nous savons bien que la colère n’est pas dans le cœur de Dieu, qu’il n’est pas capable de casser ce qu’il a fait avec amour. Face à ce mal, les mots des psaumes peuvent être très violents et nous choquer. Il faut du temps pour comprendre les racines du mal et voir que la violence habite aussi parfois notre cœur !
Le cri
Edvard Munch
La plainte, le cri, l’appel sont une part importante des psaumes. Un jour ou l’autre on s’interroge sur le sens de ce qui arrive : Dieu entend-il ces cris ? Est-il présent ? « Quand je crie, Dieu, réponds-moi » (Ps 4,2). « Combien de temps vas-tu m’oublier ? » (Ps 12,2). « Et toi Seigneur, que fais-tu ? Sauve-moi en raison de ton amour » (Ps.6, 4-5). Si nous nous tournons ainsi vers Dieu, c’est que nous croyons qu’il existe, qu’il est un interlocuteur véritable à qui nous pouvons nous adresser. Nous ne sommes plus tout seuls. Le cri le plus terrible est celui que pousse Jésus en croix, avant de mourir : « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Ps 21), Dans ce psaume, Jésus s’adresse à son Père et sa prière ouvre une brèche, infime et ténue vers l’extrême de la confiance : Jésus est mort mais Dieu l’a ressuscité et nous savons que son cri a été entendu. Dieu ne supprime pas nos épreuves ; se tenir devant lui, en toute circonstance, c’est croire qu’il est vivant, qu’il nous aime, et qu’il nous tient en sa bénédiction.
Les psaumes, avec leurs mots vrais, rudes parfois, nous permettent de faire un pas, ce petit pas d’aujourd’hui, vers la confiance qui ouvre la vie. Ils nous rendent aussi solidaires de tous ceux qui sont accablés et qui n’en peuvent plus. Les mots des psaumes sont comme des marches, où nous avançons de degré en degré, comme dans un pèlerinage vers la Jérusalem céleste, la cité de Dieu, la cité de la vie et de la joie. Le psaume 83 dit cela de belle façon : « Heureux les hommes dont tu es la force, des chemins s’ouvrent dans leur cœur ; Quand ils traversent la vallée de la soif, ils la changent en source. Ils vont de marches en marches, vers Dieu, à Sion. » (Ps 83, 6,7,8).